Comment appliquer l’intrapreneuriat au secteur public?

Par Donrock Pierre Alexis, Direction des services aux organisations de l’ENAP

Comment intraprendre dans les organisations publiques tout en respectant les obligations qui leur sont propres?

QU’EST-CE QUI CARACTÉRISE L’INTRAPRENEURIAT PUBLIC?

Les intrapreneur·es dans le secteur public font face à un défi particulier : la pression citoyenne. En effet, alors que dans le privé les risques d’un projet intrapreneurial n’impliquent qu’un groupe restreint de personnes ou d’investisseurs/investisseuses, dans les organisations publiques le risque doit être calculé, car la population souhaite des actions rapides, efficientes et elle concède généralement une très faible marge d’erreur. Dans le secteur public, le passage à une culture intrapreneuriale signifie :

  • Délaisser les anciennes structures hiérarchiques en allégeant les procédures. Les actions les plus simples ne nécessitent pas toujours plusieurs niveaux d’autorisation;
  • Mettre en œuvre une culture d’innovation et de leadership axée sur la résolution de problèmes afin de faire participer les employé·es aux réflexions stratégiques et à l’élaboration des moyens pour résoudre les problèmes;
  • S’ouvrir à la collaboration intersectorielle pour aborder les problèmes dans leur globalité, trouver des solutions aux enjeux d’harmonisation de services et recourir à la mutualisation des ressources afin de bénéficier des expertises rares.

QUELLES SONT LES PRINCIPALES CARACTÉRISTIQUES DES ORGANISATIONS PUBLIQUES INTRAPRENEURIALES?

Les organisations publiques intrapreneuriales sont flexibles. Elles cherchent à avancer rapidement et à trouver des solutions aux problèmes auxquels elles sont confrontées. Voici cinq caractéristiques principales d’une organisation publique intrapreneuriale :

  • Elle dynamise la créativité et l’innovation de ses employé·es en confiant des tâches stimulantes et intéressantes aux personnes intéressées par l’intrapreneuriat.
  • Elle communique efficacement en favorisant le partage d’informations sur les objectifs, les stratégies et les résultats obtenus ou à atteindre, non seulement entre les gestionnaires mais aussi entre les employé·es d’un même niveau hiérarchique. Ainsi, chaque personne connaît la situation réelle de l’organisation et peut y contribuer efficacement.
  • Elle soutient et reconnaît la contribution unique de chaque employé·e, notamment ses qualités intrapreneuriales.
  • Elle laisse une liberté d’action aux employé·es en leur donnant la flexibilité nécessaire pour s’adapter aux changements et pour contribuer à l’amélioration des processus.
  • Elle montre une certaine tolérance à l’erreur en l’apprivoisant comme faisant partie intégrante de l’innovation.

QUELS RÔLES PEUVENT JOUER LES INTRAPRENEURS·ES DANS VOTRE ORGANISATION?

  • Cerner un irritant ou un enjeu à résoudre en mettant le doigt sur les éléments qui nuisent à l’atteinte des résultats et qui méritent d’être améliorés.
  • Consulter les équipes dans l’élaboration et la mise en œuvre de la solution, et en s’inspirant des meilleures pratiques existantes pour tester les idées, cibler les problèmes induits par la solution, écouter attentivement le retour des personnes qui vont les utiliser pour réviser les solutions à partir de leurs commentaires.
  • Déployer la solution en veillant à ce que tout se passe bien.
  • Mesurer la performance de la solution en établissant dès le départ des indicateurs pertinents.
  • Rendre compte à sa direction générale, notamment en l’informant des résultats obtenus grâce à la solution mise en place.

La personne intrapreneur·e n’est pas responsable de toutes ces étapes; c’est pourquoi les gestionnaires doivent l’aider à bien s’entourer pour mener à bien son projet.

QU’EST-CE QU’UNE « STARTUP » D’ÉTAT?

Une jeune entreprise d’État (ou startup) est une équipe composée d’intrapreneur·es, généralement accompagnée d’une ou d’un coach en méthodes agiles et de personnes en développement informatique qui ont pour objectif commun d’apporter une réponse à une difficulté rencontrée au sein d’une administration dans la mise en œuvre d’un projet, d’une politique ou d’un service. Les startups d’État peuvent être créées par :

  • Les hauts gestionnaires pour moderniser leur administration;
  • Le personnel confronté à des problèmes de terrain, qui a des idées de solutions pour les résoudre et qui est prêt à s’impliquer dans le développement de celles-ci;
  • Les développeurs et développeuses, concepteur·es, chargé·es de déploiement, coachs, entrepreneur·es, etc. qui souhaitent mettre leurs compétences au profit de la modernisation de l’État.

LE SAVIEZ-VOUS?

En France, 63 startups d’État ont été créées depuis 2013. Elles sont accompagnées au sein de 6 incubateurs membres du réseau Découvrir le programme — beta.gouv.fr. L’ensemble des startups d’État constitue aujourd’hui un réseau de 140 personnes pour un budget annuel de 8 millions d’euros (hors rémunération du personnel public). Sur l’ensemble du portefeuille :

  • 9 startups d’État ont échoué (15 %);
  • 49 sont toujours en phase de développement (77 %);
  • 5 sont devenues des services publics numériques nationaux (8 %).